QU’APPELLE-T-ON « POLYPE », QU’EST CE QU’UN CANCER DE VESSIE ?

Les tumeurs de la vessie peuvent atteindre à un degré variable l’épaisseur de la paroi du réservoir naturel de l’urine. On distingue deux catégories de tumeurs :

Les tumeurs superficielles que l’on appelle communément polype, parce qu’elles ne touchent que les voies naturelles. Ces tumeurs superficielles ou ces polypes ont comme risque principal : la récidive dans 70 à 75 % des cas.

Les tumeurs infiltrantes ou cancer qui atteignent le muscle de la paroi vésicale. Ces tumeurs ne peuvent plus être traitées par les voies naturelles sauf exception, et nécessitent un traitement plus lourd. Le risque principal est l’évolution vers les métastases.

QUELLE EST LA FRÉQUENCE DE CES TUMEURS ?

Les tumeurs de la vessie représentent 3 à 4 % des cancers et sont les deuxièmes en ordre de fréquence parmi les tumeurs urologiques de l’homme après le cancer de la prostate. L’homme est atteint trois fois plus que la femme et l’âge moyen de découverte est d’environ 60 ans. Il n’y a pas de facteur héréditaire aujourd’hui reconnu.

EXISTE-T-IL DES CAUSES AUX TUMEURS DE LA VESSIE ?

On reconnaît aujourd’hui deux grands facteurs capables de favoriser les tumeurs de la vessie :

Le tabagisme, avec une corrélation très étroite avec le degré d’imprégnation et le risque de survenue de la tumeur.

L’exposition à certains dérivés de produits industriels, comme ceux utilisés dans l’industrie du caoutchouc, de la peinture ou des colorants (aniline).

QUELS SONT LES TYPES DE TUMEUR DE LA VESSIE QUE L’ON RENCONTRE ?

Les plus fréquentes sont les épithéliomas vésicaux à cellules transitionnelles qui s’observent dans 95 % des cas. Beaucoup plus rares, sont les tumeurs épidermoïdes, les sarcomes ou les tumeurs secondaires à une bilharziose.

COMMENT CLASSE-T-ON LES TUMEURS DE LA VESSIE ?

On les classe en stade d’infiltration croissante dans l’épaisseur de la paroi vésicale en considérant que les stades PTa, n’atteignant que la muqueuse vésicale et le stade PT1 n’atteignant que le chorion peuvent être accessibles encore à un traitement par les voies naturelles, alors qu’à partir du stade PT2 (tumeur infiltrant le muscle superficiel) jusqu’au stade PT4, le traitement devient chirurgical.
On distingue aussi l’aspect des cellules de la tumeur sous forme de grade : de G0, grade de cellules normales à G3 où les cellules sont très peu différenciées, c’est à dire qu’elles ne ressemblent plus guère à une tumeur de la vessie. Plus le grade est élevé, plus la tumeur est agressive.
Il faut mettre à part le cancer in situ qui est une forme de tumeur n’atteignant que les cellules sans réaliser de véritable prolifération.

QUELLES SONT LES MÉTASTASES LES PLUS FRÉQUENTES DES TUMEURS DE LA VESSIE ?

Elles touchent essentiellement les ganglions, les os, les poumons et le foie.

SUR QUELS ÉLÉMENTS FAIT-ON LE DIAGNOSTIC D’UNE TUMEUR DE LA VESSIE ?

L’hématurie, c’est à dire les urines sanglantes est le signe clef. Cette hématurie est le plus souvent terminale, c’est à dire qu’elle survient à la fin de la miction lorsque la vessie se contracte. Elle peut aussi être totale survenant pendant toute la miction. Les tumeurs de la vessie sont parfois révélées par des troubles mictionnels à type d’impériosité, c’est à dire d’envies pressantes difficilement contenues notamment pendant la journée et survenues récemment. Chez un homme fumeur, qui présente cette impériosité survenue récemment, il faut se méfier d’une tumeur de la vessie et réaliser les examens complémentaires nécessaires. Beaucoup plus rarement, les tumeurs de la vessie sont détectées par une échographie abdominale systématique.

QUELS SONT LES EXAMENS CLEFS DU DIAGNOSTIC ?

ILS SONT AU NOMBRE DE TROIS :

L’échographie vésicale, qui lorsqu’elle montre la lacune du polype dans la vessie il suffit à affirmer le diagnostic et évitera une fibroscopie

La fibroscopie vésicale, examen qui se réalise généralement à la consultation et consiste à passer une fibre optique souple dans le canal de l’urètre pour inspecter la totalité du réservoir vésical. On peut y retrouver ainsi un ou plusieurs polypes, les localiser par rapport au col de la vessie et aux orifices des uretères.

La cytologie, examen qui consiste à prélever quelques centimètres cube d’urines pour analyser les cellules de la tumeur qui y seraient contenues. Cet examen est difficile et nécessite des laboratoires expérimentés.

On recherche aussi une autre localisation grâce à l’urographie intraveineuse, car la maladie peut toucher toute la muqueuse de la voie excrétrice urinaire depuis le calice du rein jusqu’au méat de l’urètre.

QUEL EST L’ÉLÉMENT QUI NOUS PERMETTRA D’ÉTABLIR LE DIAGNOSTIC ET D’ENVISAGER LE TRAITEMENT ?

Cet examen est la résection endoscopique par les voies naturelles.
Il s’agit de passer un instrument appelé résecteur dans le canal de l’urètre et de réséquer, c’est à dire d’enlever, comme en rarclant le polype de la paroi vésicale. On pourra alors l’examiner au microscope, élément capital de la décision du traitement futur. Cette résection endoscopique se fait en hospitalisation, sous anesthésie générale ou péridurale, et nécessite la mise en place d’une sonde et un séjour de quelques jours.

Y A-T-IL D’AUTRES EXAMENS À PRATIQUER DANS LE BILAN D’EXTENSION ?

Tout dépend du type de tumeur que l’on retrouve à l’examen du microscope. S’il s’agit d’un polype superficiel, il n’y a pas lieu d’entreprendre d’autres examens. Si la tumeur est infiltrante, on peut discuter d’un scanner abdomino-pelvien à la recherche d’une extension locorégionale ou de ganglions, d’une échographie hépatique à la recherche de métastases du foie.
La scintigraphie osseuse n’est demandée que lorsqu’il existe des douleurs osseuses particulières. Elle ne doit pas être pratiquée en routine. Enfin, une radio de thorax est réalisée afin de vérifier l’absence d’atteinte pulmonaire.

Une fois le diagnostic fait, comment peut-on envisager le traitement en se rappelant qu’il y a donc deux grandes formes : les polypes de la vessie et les tumeurs infiltrantes ou cancer.

LE TRAITEMENT DES POLYPES VÉSICAUX

Si la tumeur est superficielle, après avoir réalisé la résection endoscopique complète du polype, en cas d’analyse indiquant que l’atteinte est purement muqueuse et que le grade n’est pas trop élevé, si la tumeur est unique on peut s’abstenir de tout traitement complémentaire.

A titre expérimental, un traitement par ultrasons focalisés par voie externe est actuellement en cours d’étude sous forme de protocole de traitements des tumeurs superficielles.

Si en revanche, la tumeur est multiple ou atteint le chorion stade PT1, ou encore est d’un grade élevé G3, il faudra entreprendre un traitement par instillations endo-vésicales, soit de chimiothérapie (Mitomycine C) ou d’immunothérapie (BCG). Les deux techniques ont des résultats intéressants en réduisant la fréquence et le nombre de récidives et en limitant l’évolution possible de certaines tumeurs PT1-G3 assez agressives.

Dans tous les cas, c’est l’urologue qui renseignera au mieux le malade, sur le type de traitement à entreprendre. Ces instillations se font à la consultation, généralement une fois par semaine pendant six semaines, suivies ou non d’un traitement de complément tous les mois ou tous les deux mois, pendant un ou deux ans.

Le risque véritable des tumeurs superficielles (polypes de la vessie) est effectivement la récidive.
Ces récidives peuvent être multiples, et survenir à des intervalles variés de quelques mois, à plusieurs années. C’est pourquoi la surveillance est essentielle, réalisée tous les six mois pendant 18 mois environ, puis tous les ans ensuite grâce à une échographie vésicale ou une fibroscopie vésicale et une cytologie urinaire.

L’évolution des tumeurs superficielles de la vessie vers un cancer est beaucoup plus rare (entre 5 et 10 % des cas) et est le fait des tumeurs appelées PT1-G3 assez agressives, et dans ce cas, il ne faut pas hésiter après le traitement par chimio ou immunothérapie, à vérifier la vessie par de nouvelles résections et biopsies multiples.

LE TRAITEMENT DES CANCERS DE LA VESSIE

Lorsque la tumeur atteint le muscle, le traitement doit être nettement plus lourd car la chirurgie endoscopique n’a guère plus de place. Cette chirurgie permet bien sûr de faire le diagnostic, mais ensuite il faut pouvoir enlever la tumeur le plus complètement possible. On s’adresse alors à la chirurgie qui consiste à faire une prostato-cystectomie radicale 1, enlevant la prostate, les vésicules séminales et la vessie, avec un curage des ganglions du pelvis suivis soit d’un remplacement de la vessie par un segment d’intestin grêle d’environ 30 à 50 cm de long (néo-vessie intestinale), et en y implantant les deux uretères, soit en mettant les deux uretères dans le côlon ou le rectum assurant des mictions rectales 2, soit enfin en dérivant des urines à la peau par urétérostomie cutanée bilatérale, chaque uretère étant placé à la peau, soit plus simplement par une intervention de Bricker 3 utilisant un petit segment de l’intestin grêle pour y placer les deux uretères et n’avoir pas de sonde ni deux poches à appareiller, mais une seule.

Lorsque la maladie le permet, il est aussi possible de préserver la prostate, permettant ainsi une excellente continence, et la conservation d’une vie sexuelle de qualité, tout en enlevant la vessie et en remplaçant cette dernière par de l’intestin.

D’autres traitements sont proposés qui consistent à utiliser après la résection endoscopique, une chimiothérapie associée à des rayons par voie externe, espérant ainsi stériliser la tumeur. En cas d’évolution, la chirurgie radicale d’ablation redevient nécessaire.

Lorsqu’il existe des ganglions atteints ou d’autres métastases, la chimiothérapie a une certaine efficacité et peut être légitimement proposée au malade. En revanche, le fait de proposer systématiquement une chimiothérapie après l’intervention d’ablation de la vessie est beaucoup plus discutable.

AVEC QUELS EXAMENS DOIT-ON ÊTRE SUIVI LORSQU’ON A UNE TUMEUR INFILTRANTE DE LA VESSIE ?

En fonction du moyen de dériver les urines, on réalisera un bilan sanguin avec un ionogramme, un dosage de la créatinine et en vue de recherche une éventuelle récidive ou des métastases, un scanner abdominal et pelvien et thoracique, ou une radio du thorax et une échographie hépatique.

Le rythme de ces examens peut être de six mois les trois premières années, puis environ un an ensuite.

Au total, les tumeurs de la vessie sont relativement fréquentes, il s’agit de tumeurs qui peuvent être cancéreuses et, dans ce cas, agressives. C’est en pensant à les prendre en charge tôt, dès le premier saignement que nous pourrons offrir aux malades, en plus de durée et du confort de vie, les traitements les mieux adaptés et les moins mutilants.