Au cours de son histoire, l’Église Catholique a développée une doctrine en matière de sexualité, reflétée dans de nombreuses encycliques (Casti Connubii, Humanæ Vitæ et Evangelium vitæ) ainsi que dans les enseignements du pape Jean Paul II sur la théologie du corps.  Depuis 1992, la doctrine est résumée dans le Cathéchisme de l’Église Catholique (CEC).

La sexualité et le plaisir sexuel sont considérés comme des aspects de l’amour conjugal,  un moyen de parfaire l’union corporelle et spirituelle entre homme et femme. Pour respecter le plan divin et la dignité humaine, la sexualité doit être un don total dans le cadre indissoluble du sacrement du mariage, et doit notamment rester ouverte à la procréation. Sexualité et Procréation sont donc indissociables et confinées au sein du mariage, ce qui a pour conséquences :

  • La sexualité hors mariage est rejetée, notamment la cohabitation avant mariage est contraire à la doctrine.
  • Le divorce est une rupture du sacrement du mariage et donc proscrit.
  • Le remariage n’est possible qu’en cas d’annulation par l’autorité religieuse du premier mariage.
  • La contraception par des méthodes artificielle n’est pas autorisée. Le préservatif peut être autorisé si la vie d’un des membres du couple est mise en danger.
  • Les rapports homosexuels sont proscrits.
  • L’IVG et l’Interruption Thérapeutique de Grossesse (ITG) ne sont pas autorisées car l’être humain est considéré comme animé dès la fécondation. Le diagnostic anté natal n’est autorisé que lorsqu’il est motivé par la sauvegarde et le traitement du fœtus.

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  • La PMA n’est autorisée que si elle répond à des critères stricts : Sa finalité doit être d’aider à donner la vie dans le respect des êtres humains, des gamètes manipulés et dans le respect du processus d’humanisation.
  • La fécondation in vitro (FIV), la manipulation exogène de gamètes, la thérapie génique, la congélation des embryons à forciori dans un but de recherche clinique sont fortement prohibées.
  • Les prêtres catholiques font promesse de célibat et suivent les trois conseils évangéliques en faisant vœu d’obéissance (à leur évêque), de pauvreté et de chasteté.

Sexualité et Spiritualité

Il existe un lien étroit, dans la religion catholique, entre spiritualité et sexualité.

Pour un catholique, le sens prioritaire de la vie est de se rapprocher constamment de Dieu, et d’éviter le péché, c’est-à-dire ce qui éloigne de Dieu. Dans ce contexte, le problème pour un catholique est de savoir quel est le but qu’il poursuit réellement, sa priorité à la fois par rapport à lui-même, et dans sa relation à son partenaire.

Dans le domaine de la vie sexuelle, la réflexion de l’Église part d’un double constat : d’un côté, l’homme et la femme sont des êtres sexués, pour lesquels une activité sexuelle est a priori une bonne chose ; d’un autre côté une pratique non maîtrisée ou non disciplinée de la sexualité peut conduire à des impasses morales et à des blessures psychologiques. Ces situations d’échec, dans une vision catholique, sont la manifestation de ce qu’on s’éloigne de Dieu.

Pour l’Église catholique, une forme de vie sexuelle « libre », même si elle est compatible avec la nature biologique de l’homme, est jugée dangereuse parce qu’elle n’intègre pas de manière satisfaisante la dimension sociale de l’Homme (dans sa relation à l’autre) ni sa dimension spirituelle (dans sa relation à Dieu). Si une relation à deux se fonde sur une sexualité abordée de manière purement biologique (en quelque sorte, « comme des bêtes »), le partenaire se trouve de fait réduit à un objet sexuel, ce qui n’est pas admissible pour quelqu’un qui se considère comme le « temple de l’Esprit Saint » et qui veut reconnaître dans l’autre « l’image de Dieu« , ce qui est l’approche normalement revendiquée par un chrétien catholique.

Une forme « libre » de sexualité, qui ne permet pas de se rapprocher de Dieu,  est donc finalement à éviter pour rester cohérent avec sa foi. Ainsi le chrétien catholique est donc conduit à rattacher sa vie sexuelle à sa vie spirituelle, en conservant la première place à la spiritualité. Ceci implique avant tout que la relation sexuelle s’inscrive dans une relation qui respecte l’autre, en tant qu’être spirituel, et qui ne risque pas de le rabaisser à l’état d’objet.

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La solution retenue par la spiritualité catholique est de « se donner » dans le mariage : on accepte d’être soi-même objet donné, pour ne pas transformer l’autre en objet. Dans le mariage, l’activité sexuelle n’est pas prise pour elle-même, mais est mise au service d’un but spirituel (créer un centre d’amour mutuel, contribuer au bien mutuel des époux, fonder une famille, …) qui en devient la valeur première. La théologie du mariage s’appuie bien entendu sur des références bibliques, mais le nœud du problème est que le mariage catholique est un don mutuel permanent, essentiellement parce que toute autre solution conduit fatalement à « chosifier » le partenaire. Mais cette logique du don ne peut fonctionner que s’il est réciproque, et aussi -parce que c’est un don- s’il est permanent. Sinon, il n’est pas authentique.

« L’amour, qui devient alors une véritable découverte de l’autre, dépasse donc le caractère égoïste qui dominait clairement auparavant. L’amour devient maintenant soin de l’autre et pour l’autre. Il ne se cherche plus lui-même – l’immersion dans l’ivresse du bonheur – il cherche au contraire le bien de l’être aimé : il devient renoncement, il est prêt au sacrifice, il le recherche même » (Benoit XVI – Deus Caritas est)

Sexualité et Chasteté

La chasteté est souvent confondue avec l’abstinence de relation sexuelle. En réalité, dans l’approche catholique, la chasteté consiste à vivre sa sexualité d’une manière conforme à son état : les relations sexuelles dans un couple sont  » chastes  » quand elles traduisent une relation authentique de ce couple.  » La chasteté signifie l’intégration réussie de la sexualité dans la personne, et par là, l’unité intérieure de l’homme, dans son être corporel et spirituel  » ;  » La vertu de la chasteté est placée sous la mouvance de la vertu cardinale de tempérance, qui vise à imprégner de raison les passions et les appétits de la sensibilité humaine  » (Catéchisme de l’Église Catholique, §2337 et 2341)

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La chasteté des prêtres est le corollaire de leur célibat. Les écclésiatsiques sont tenus par l’obligation de garder la « continence parfaite et perpétuelle » conformément à la vie de Jésus Christ, et sont donc astreints au célibat, don particulier de Dieu par lequel les ministres sacrés peuvent s’unir plus facilement au Christ avec un cœur sans partage et s’adonner plus librement au service de Dieu et des hommes.  Ils doivent se conduire avec la prudence voulue dans leurs rapports avec les personnes qui pourraient mettre en danger leur devoir de garder la continence ou causer du scandale chez les fidèles. « Le dévouement qui conforme le prêtre au Christ et l’offrande exclusive de lui-même pour le Règne de Dieu trouvent une expression particulière. Le fait que le Christ lui-même, prêtre pour l’éternité, ait vécu sa mission jusqu’au Sacrifice de la croix dans l’état de virginité constitue le point de référence sûr pour recueillir le sens de la tradition de l’Église latine sur cette question. Il n’est donc pas suffisant de comprendre le célibat sacerdotal en termes purement fonctionnels. En réalité, il est une conformation particulière au style de vie du Christ lui-même » (Benoît XVI – Sacramentum Caritatis)

  • une signification unitive, c’est-à-dire que l’acte sexuel renforce l’unité des conjoints et leur communion, notamment par le plaisir partagé ;
  • une signification procréative, c’est-à-dire que l’acte sexuel est susceptible de donner naissance à un enfant.

L’encyclique Humanæ Vitæ pose comme principe moral que ces deux significations ne doivent pas être volontairement séparées, ce qui exclut de fait deux attitudes opposées :

  • le refus de la signification procréative (le  » sexe sans enfant « ) : il s’agit des actes posés avant, pendant ou après l’acte sexuel dans le but de le rendre volontairement infécond. Tel est le cas de la contraception en général (pilule, préservatif, stérilet, etc), dans la mesure où le couple recherche le plaisir sans assumer le possibilité de donner la vie. En revanche, l’Église considère que les couples peuvent légitimement avoir une relation sexuelle inféconde, par exemple dans une période non fertile du cycle menstruel, ou en cas de ménopause, ou à la suite d’un traitement médical, du moment que le caractère infécond n’est pas recherché en tant que tel.
  • le refus de la signification unitive ( » l’enfant sans le sexe « ) : il s’agit des cas où l’enfant est recherché pour lui-même, tandis que l’union sexuelle des conjoints est refusée ou négligée. Par exemple, Jean-Paul II a vivement critiqué l’idée selon laquelle la relation sexuelle ne doit être recherchée que dans le but de concevoir un enfant et le plaisir sexuel considéré comme accidentel, ne devant pas être recherché pour lui-même. Un autre exemple est la fécondation in vitro , dans laquelle l’enfant est conçu en-dehors de l’union physique des époux. C’est pour ce motif, entre autres, que l’Église considère que la fécondation in vitro n’est pas moralement acceptable (la fécondation in vitro pose aussi un autre problème moral au sujet de la destruction des embryons surnuméraires).

L’Église catholique veut donc refuser l’instrumentalisation de la sexualité, tant en vue du plaisir seul qu’en vue de la procréation seule. Elle reconnaît aux couples la responsabilité de décider si (et quand) ils veulent des enfants. Pour les périodes où ils ne souhaitent pas concevoir d’enfant, les seules méthodes de régulation des naissances acceptées sont les méthodes « naturelles » qui s’appuient la continence périodique. Dans ce cas, les couples n’ont de relations sexuelles que pendant les périodes infertiles du cycle menstruel. Ainsi, l’Église ne légitime pas ces méthodes naturelles en raison de leur caractère écologique (bien que ces méthodes soient effectivement écologiques), en opposition à des méthodes qui seraient dites « artificielles ». Elle les recommande parce qu’elles s’appuient sur la continence périodique qui permet aux couples de rester ouvert à la procréation. En effet, ils ne modifient rien à la fertilité biologique, et ne font qu’utiliser une disposition naturelle qui fait qu’ils ne sont pas fertiles pendant cette période. A contrario, la méthode du » retrait », quoique parfaitement écologique, n’entre pas dans les critères posés par l’Église car elle interrompt le déroulement de l’acte sexuel en vue de le rendre volontairement infécond.

Au total, la sexualité et la procréation sont intimement liées dans la religion catholique. Elles sont le fruit d’une approche morale qui vise au respect absolu de la dignité humaine, mettant la spiritualité au dessus des considérations purement « biologiques ». L’élévation spirituelle dans le but d’un rapprochement avec Dieu doit guider les actes de la vie terrestre.

Docteur Denis Bretheau