Depuis quelques années, le monde chirurgical s’est inspiré des mesures adoptées dans le monde de l’aéronautique connues sous le terme de Crew Ressource Management (CRM). Très tôt, l’impact des facteurs humains a été mis en évidence dans la survenue d’accidents aériens et en 1979, aux USA, la NASA et le MIT ont défini l’outil CRM qui s’est ensuite progressivement imposé à l’ensemble du secteur.

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L’avion, en particulier, le cockpit et le bloc opératoire ont des similitudes de fonctionnement. Dans les deux structures, on retrouve un environnement technique complexe, une équipe hiérarchisée, différents métiers, un but commun ainsi que des contraintes et des risques importants.

L’exemple le plus marquant du transfert de processus de fonctionnement de l’aérien au monde médical est l’introduction de la check-list du bloc opératoire. Directement inspirée de celle d’un vol aérien, elle a été mise en place par l’OMS, validée en France par la Haute Autorité de Santé (HAS) et systématiquement mise en pratique avant toute procédure chirurgicale. Elle vise à recentrer l’équipe chirurgicale au sens large sur ses objectifs communs et à réduire les risques d’évènements  graves.

Le CRM apporte des éléments concrets permettant d’améliorer la sécurité des procédures tout au long de leur déroulement. L’outil met en valeur :

  • l’équipe dont il permet de définir les contours, le rôle de chacun en son sein, le leadership et la dynamique d’autorité, le contrôle interpersonnel dans la confiance.
  • Il insiste sur la communication au sein de l’équipe qui doit être améliorée par un langage adapté autour d’items limités en respectant les contraintes de chacun.
  • Cette communication doit permettre de maintenir une bonne conscience de la situation, avec un plan d’action défini et clair, une bonne gestion de l’attention. La communication doit rester simple, efficace et appropriée en situation de stress.
  • La prise de décision, processus cognitif qui amène la personne à choisir une solution à un problème, découle du maintient d’une bonne conscience de la situation et du niveau de risque perçu par l’individu. Elle peut être négativement influençée par des biais de conformité, de confirmation ou de statu-quo ; elle peut faire l’objet d’une mauvaise analyse de la situation responsable d’une mauvaise sélection d’actions.
  • Le CRM considère l’erreur humaine comme inévitable. Celle-ci n’est plus considérée uniquement comme une erreur personnelle mais comme une faillite de l’ensemble de l’organisation. C’est à partir de ce constat basé sur le modèle de Reason (selon lequel un accident n’est pas le résultat d’une seule erreur mais d’un enchainement de failles du système) que les mesures de traitement et surtout de prévention sont mises en application. Les check-Lists, les briefings, la préparation attentive, la mise en place de procédures standardisées sont autant de mesures qui permettent d’améliorer la qualité du travail et la sécurité  des vols aériens comme des interventions chirurgicales.


Au total, le monde chirurgical tire bénéfice des mesures appliquées et des procédures mise en place dans le secteur aéronautique. La rigueur et la sécurité de l’activité des blocs opératoires doit beaucoup à la transposition des mesures prises au sein des avions de ligne.

Docteur Denis Bretheau

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