Le Dr Laure Grellet, sexologue, s’intéresse aux nouvelles pratiques adolescentes, particulièrement au cybersex et au sexting (échange par voie électronique des messages, photos ou vidéos à caractère sexuel). « Il est évident que les nouvelles technologies transforment nos relations affectives et nos relations sociales », explique-t-elle. Un sondage IFOP 2013 met en évidence l’attrait des Français, et notamment des moins de 25 ans, pour les sexcams comme pour le sexting. « L’espace virtuel offert par internet constitue un lieu idéal pour assouvir des fantasmes que l’on ne peut pas observer ou donner à voir dans la réalité ».

Les études ont montré que les risques en ligne étaient souvent corrélés aux risques hors ligne. « Les risques sont les mêmes que dans la vraie vie », ajoute le Dr Grellet. « Le fait d’avoir un outil disponible, c’est addictif et d’autant plus tentant chez les jeunes qui, pour certains, ont des problèmes de repères ». Ces nouveaux médias peuvent être désinhibiteurs et favoriser les passages à l’acte sexuel. « Les sites de rencontre et les chats ouvrent une porte de plus, c’est évident. En fait, les personnalités influençables dans la vie le seront souvent sur internet ».

Clivage entre pratiques virtuelles et réelles
Laure Grellet ajoute que les personnes ayant des problèmes uro-sexologiques réels auront plus de facilité avec internet. « Une vulnérabilité urologique et sexologique peut altérer la sexualité et enfermer la personne dans un univers virtuel avec des conséquences importantes. Les chats seront plus utilisés par les éjaculateurs précoces par exemple. Alors une addiction peut se développer, renforcée par la frustration liée au trouble sexuel initial ».

Le danger principal d’internet, serait-il de rester dans l’illusion ? « Ce sont des outils qui ne laissent pas le temps à l’ennui et génèrent de la compulsion. Ils peuvent générer de nouveaux comportements, potentiellement à risques : relations non protégées impliquant un risque infectieux, relations non souhaitées, traumatiques ». Pour autant, ces changements ne sont pas que négatifs. « Ils peuvent avoir des effets positifs pour les gens timides, ou seuls, qui n’arrivent pas à élargir leur cercle d’amis. Il ne faut pas avoir un discours de diabolisation. C’est pourquoi il est important d’en parler ».

Docteur Denis Bretheau

Références

  • Doornwaard SM(1), Bickham DS(2), Rich M(2), Vanwesenbeeck I(3), van den Eijnden RJ(3), ter Bogt TF(3). Sex-related online behaviors and adolescents’ body and sexual self-perceptions. Pediatrics. 2014
  • David Finkelhor. Commentary : Cause for alarm? Youth and internet risk research – a commentary on Livingstone and Smith (2014). Journal of Child Psychology and Psychiatry 55:6 (2014), pp 655–658
  • IFOP : Enquête sur le sexe virtuel via les webcams et les nouvelles technologies. Le «Sexe 2.0». 2013
  • Sonia Livingstone and Peter K Smith. Annual Research Review: Harms experienced by child users of online and mobile technologies: the nature, prevalence and management of sexual and aggressive risks in the digital age. J Child Psychol Psychiatr 2014; 55(6): 635–54
  • Valkenburg PM, Peter J. Online communication among adolescents: an integrated model of its attraction, opportunities, and risks. J Adolesc Health. 2011